
Jean Tinguely (1925-1991) était un sculpteur et peintre suisse, pionnier de l’art cinétique. Fasciné par le mouvement et la machine, il a passé sa vie à créer des sculptures animées, souvent à partir de matériaux de récupération : ferraille, roues, moteurs, objets du quotidien… Ma stupéfaction en face de Heureka, lors de l’Exposition Nationale Suisse de 1964, marqua mon premier contact avec son univers. Ce gigantesque assemblage de roues, moteurs et ferraille, animé par un chaos sonore et visuel fascinant, incarnait l’esprit créatif et ingénieux de l’artiste. À tel point que l’expression « Machine à Tinguely » est née à cette époque en Suisse romande. Hélas, Heureka n’est pas exposée au Musée Tinguely, elle trône aujourd’hui au Zürichhorn, au bord du lac de Zurich.
Situé dans le parc Solitude, directement au bord du Rhin, le bâtiment du Musée, conçu par Mario Botta impressionne. Le musée rassemble une collection couvrant toutes les périodes de création de Tinguely. Le musée est remarquablement accueillant pour tous. J’ai vu de jeunes enfants ramper à quatre pattes pour démarrer l’animation des sculptures, et des visiteurs plus âgés profiter tranquillement du spectacle, assis sur les chaises pliantes fournies par le musée. Des adolescents myopathes à mobilité réduite semblaient trouver là un espace où l’art entrait en résonance avec leur expérience.
Les plus petits sont immédiatement fascinés par le mouvement, le bruit, les couleurs et, surtout, par la possibilité d’appuyer sur des boutons pour mettre les œuvres en marche. C’est comme un immense terrain de jeu mécanique. Les adultes, quant à eux, admirent l’ingéniosité de Tinguely, son humour mordant, et la critique sociale abordant la surconsommation et l’excès de mécanisation, sans oublier la poésie brute qui émane de ces assemblages. Tinguely savait transformer des objets familiers en créatures animées, suscitant un émerveillement universel.
On découvre en entrant les premières œuvres de l’artiste, les plus délicates, où le mouvement est subtil, presque hésitant. Suivent les Méta-Matics : d’incroyables « machines à dessiner ». En actionnant un mécanisme, la machine se met en branle et crée une œuvre d’art abstraite unique sur une feuille de papier. Des esquisses et documents laissés par l’artiste dévoilent son processus créatif et son imagination débordante, permettant une plongée intime dans son esprit visionnaire. Le cœur de la visite bat dans l’immense halle des Sculptures Monumentales. Ici les rouages tournent, les courroies grincent et les objets s’entrechoquent dans un ballet tantôt harmonieux, tantôt cacophonique. Certaines sculptures nous invitent même à nous aventurer à l’intérieur de la structure, nous happant dans un univers mécanique et onirique.

Ma visite au Musée Tinguely fut une véritable bouffée d’air frais artistique. Loin de la contemplation passive, j’ai été captivé par l’énergie, l’humour et la poésie mécanique de Jean Tinguely. Ce musée, véritablement vivant, s’adresse à notre enfant intérieur tout en stimulant la réflexion.
Informations pratiques
Adresse : Museum Tinguely, Paul Sacher-Anlage 1, 4058 Bâle
Site officiel : www.tinguely.ch
Accès : Depuis la gare, plusieurs itinéraires en tram ou bus vous mènent à proximité.
Profitez-en pour une promenade le long du Rhin.