C’était il y a cinq ou six ans, dans le Sud de la France. Je venais d’allumer un barbecue avec une méthode peu traditionnelle mais diablement efficace: un brûleur thermique à gaz pour les mauvaises herbes. En rangeant l’engin, j’ai fait la bêtise de rattraper la buse encore brûlante plutôt que de la laisser tomber. Immédiatement, une importante cloque s’est formée dans la paume de ma main, très douloureuse.
Je serrais les dents et jurais contre ma stupidité lorsqu’une amie autour de la table a suggéré d’appeler une de ses connaissances dans le Jura suisse qui pourrait me soigner grâce au secret. Je suis athée et plutôt sceptique sur tout ce qui échappe à un raisonnement scientifique, surtout si cela se fait par téléphone. Je me souviens donc d’avoir ricané en demandant si personne n’avait une meilleure idée et en priant mon voisin de remplir mon verre de rhum! Mais ma femme ne m’a pas écouté et a appelé cette personne qu’elle ne connaissait pas, lui a expliqué la situation et lui a simplement communiqué mon prénom, ma date de naissance et le lieu où nous nous trouvions.
Puisque je vous le raconte, vous doutez de l’issue: la douleur a rapidement diminué et une heure après, elle s’était complètement envolée. Les jours suivants, la cloque, que j’ai continué régulièrement à désinfecter, s’est dégonflée et a disparu. Je suis toujours athée, mais je suis bien obligé de reconnaître que quelque chose s’est passé, comme de très nombreux autres témoignages l’ont confirmé avant moi. Et in fine, peu importe s’il s’agit d’un effet placebo, du moment que la guérison est possible!
La plupart des «secrets» sont en fait des prières ou des incantations que seuls les faiseurs connaissent et qu’ils formulent à distance en se concentrant sur la personne à soigner. Ils les ont eux-mêmes reçus d’un proche ou d’une personne de confiance et s’engagent à ne les utiliser que pour aider et soigner, sans trier ni faire payer (un don est toutefois possible mais ne doit pas être une condition préalable). Ils ont également l’interdiction de formuler un diagnostic, de promettre la guérison et de suggérer au patient d’interrompre un suivi médical.
Longtemps méprisés par les disciples d’Hippocrate, les faiseurs de secrets ont lentement réussi à faire évoluer les choses. Même s’ils ne font toujours pas l’unanimité, une liste est souvent disponible mais réservée (sur demande) aux patients des urgences ou dans les services des grands brûlés, notamment au CHUV. On trouve également 230 adresses dans «Le nouveau guide des guérisseurs de Suisse romande» de Magali Jenny (février 2022, éditions Favre). Ou dans l’application «Faiseurs Secrets» (Google ou Apple, achat unique de 5 fr.) régulièrement mise à jour par le Valaisan Georges Delaloye, lui-même détenteur d’un secret et appelé des dizaines de fois par jour à cette effet.
Sceptiques? Je vous comprends. Je vous ai même précédés! Mais en fin de compte, quel risque prenez-vous? Aucun. Alors, pourquoi ne pas essayer? Même si l’on ne croit pas, même si on y croit pas, cela peut marcher, j’en suis la preuve. Alors?